La crise sanitaire que nous traversons montre l’incapacité de notre système de santé à y répondre. Il est frappant de constater que cette situation se retrouve dans la plupart des pays occidentaux et, notamment, européens.
Certaines causes peuvent être diverses selon les pays mais d’autres sont communes. Depuis quarante ans, tous ont décidé de limiter au maximum, voire de diminuer, leurs dépenses de santé au profit des aides sociales. En tête de liste, la Grande-Bretagne avec son système de santé, le « National Health Service », qui a hypertrophié la place des généralistes au détriment des spécialistes et a lancé de fortes réductions de ses capacités hospitalières.
Ce modèle a suscité l’envie des technocrates des autres pays qui n’ont eu de cesse de le déployer chez eux.
En France, les « têtes pensantes » ont également voulu appliquer une recette d’économie commerciale pour la santé : « diminuer l’offre pour diminuer la demande ».
Hélas pour eux, la santé et la médecine ne sont pas un commerce. Grâce ou à cause de l’amélioration des soins, on assiste à un vieillissement général de la population. Ce vieillissement génère, logiquement, une augmentation de la demande à laquelle la désertification médicale, entrainée par le numérus clausus en place depuis 1974, ne permet pas de répondre de façon satisfaisante.
L’application d’une enveloppe budgétaire annuelle en santé, dont l’évolution est inférieure aux besoins réels de la demande, renforce ce déséquilibre.
Soulignons qu’entre 2016 et 2017, les dépenses de sécurité sociale (incluant chômage et retraites) ont augmenté de 2,2% (597,6 Mds), moins vite que celles des administrations publiques 2,6% (787,7 Mds) pourtant plus élevées.
Pour rester dans cette enveloppe – en plus de la baisse démographique de toutes les professions de santé – l’État a supprimé des milliers de lits d’hospitalisation sans se préoccuper de la désertification des territoires. Désertification qui est un cercle vicieux : disparition des structures d’hospitalisation (publiques ou privées) d’où un désintérêt à l’installation des médecins dans ces territoires, etc.
Il en est de même pour le déploiement de l’imagerie en coupe en France qui est le plus faible en Europe et se caractérise, en plus, par de fortes inégalités territoriales.
Et comme ces dispositions mortifères ne suffisaient pas pour rester dans cette sacro-sainte enveloppe, les tarifs médicaux sont bloqués depuis quinze ans, voire même baissés dans certaines spécialités comme la radiologie ou la biologie.
Les honoraires médicaux en France sont les plus bas d’Europe !
Le même raisonnement a été appliqué, malheureusement, aussi à la recherche et notamment la recherche médicale. Les effets directs et délétères, en France, lors de cette pandémie en sont la preuve.
Pour aggraver le tout, les réformes de l’hôpital, en supprimant les postes de médecins attachés, ont accentué les vacances de postes dans le service public. Dans le même temps, ont été créés des postes administratifs sans effet sur le service médical rendu.
De plus, pour des raisons idéologiques, seuls les hôpitaux publics trouvent une relative considération auprès des politiques, le secteur privé et libéral ne faisant pas, selon ces mêmes politiques, de médecine mais seulement « du fric » !
Comment s’étonner alors que le système soit débordé par cette épidémie, et cela dans tous les pays européens ?
Ce que nos chers économistes de la santé – qui ne connaissent que cette maxime « diminuer l’offre pour diminuer la demande » – ont oublié c’est que la finalité d’un bon système de santé est de soigner et de sauver des vies.
Il est aussi source de richesses ! Une population en bonne santé génère de la richesse par une meilleure prise en charge, des traitements précoces et mieux adaptés, des économies sur les arrêts de travail.
Les professionnels de santé avec leurs personnels salariés contribuent à la création d’emplois. Par les investissements qu’ils réalisent, ils font travailler les entreprises qui fabriquent leurs équipements et celles qui les entretiennent : ils favorisent là encore l’emploi et la recherche.
Cette crise est un signal d’alarme ! Pour notre système de santé, pour notre société. Que les 100 000 morts de cette épidémie ne soient pas morts pour rien !
Sans un changement profond du paradigme qui nous gouverne, il faut s’attendre à voir se reproduire ces mêmes effets, les causes n’ayant non seulement pas été corrigées mais au contraire aggravées.